L'Interprétation sociologique des rêves

Publié le par Elisa

L'Interprétation sociologique des rêves

Cet essai du professeur de sociologie Bernard Lahire est le premier volet d'une recherche en cours. Parcourant l'histoire de l'interprétation des rêves, il explique ce qui a conduit sa réflexion dans l'élaboration de sa propre méthode de recherche. Choisir le rêve comme objet d'étude sociologique m'a paru pour le moins insolite ! 

Bernard Lahire considère le rêve comme l'expression la plus libre de nos émotions et questions existentielles. Il ne l'interprète pas comme le produit d'un refoulement comme Freud mais comme le lieu d'expression le plus libre de soi à soi. Il serait alors l'amalgame d'un "passé incorporé" et d'un présent subjectifs. Loin d'être une étrangeté il faudrait accueillir le rêve "comme une forme parmi tant d'autres de conscience humaine, et en faisant quelque chose d'étrange, on empêche de le penser comme une variation expressive.[...] Non seulement la part des rêveries éveillées dans la vie quotidienne est grande, non seulement les moments d'affaiblissement du contrôle y sont nombreux, mais c'est surtout le fonctionnement routinier de l'activité mentale sur le mode du pilotage automatique qui déborde en permanence la volonté de l'individu dans sa vie quotidienne. Situé dans un continuum, le rêve n'est qu'une forme d'expression possible parmi d'autres".

Forme d'expression possible parmi d'autres, elle est donc un objet analysable au même titre que d'autres . Quelle analyse le sociologue peut-il faire de cet objet ? Bernard Lahire répond  à cette question en évoquant le "fond schématique" ou "dispositionnel" qui se dégage alors des récits de rêves. Il serait ainsi structuré  "1) par les schèmes et dispositions- produits de l'histoire sociale du rêveur- structurant la personnalité du rêveur; 2) par les éléments structurants de sa problématique existentielle ; 3) par les stimuli internes qui, produits différés de sollicitations externes récentes (les événements récents de la vie éveillée qui ont réveillé les dispositions et les éléments de la problématique existentielle du rêveur) agissent comme les déclencheurs des images du rêve".
J'espère que cette citation, hors-contexte, paraîtra néanmoins claire. Je suis curieuse de découvrir la suite de cette recherche et aventure, en particulier l'analyse de cas concrets. Un exemple, extrait d'une étude de rêves menée par d'autres chercheurs pendant la dictature du IIIème Reich, est particulièrement frappant. Des traits oniriques communs émergeaient chez les citoyens : les rêveurs évoquaient ainsi les murs de leur appartement ou de leur maison qui disparaissaient, s'affaissaient comme si la frontière entre l'intime et le public se désintégrait...
Quels seraient les traits communs à nos rêves aujourd'hui ?

 

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